De l’instruction de la jeunesse troyenne au 17e siècle (2) : une rentrée des classes à l’époque de Louis XIII

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Par Etienne Naddeo | Le 7 septembre 2018 | Histoire locale | Personnages troyens

En ces temps de rentrée, nous continuons notre série sur l’histoire de l’éducation à Troyes. Après avoir évoqué l’éducation des filles, intéressons-nous maintenant à celle des garçons.

Lorsqu’on remonte l’histoire de l’éducation des garçons à Troyes, un premier constat s’impose : le cliché de la bonne éducation classique chez les Jésuites ne s’applique pas dans la ville. Si de nombreux ordre religieux sont venus s’installer à Troyes au début du 17e siècle, les Jésuites n’ont tout simplement jamais réussi à y prendre pied.

La raison ? L’opposition de certains troyens influents. Frère du maire de Troyes Antoine Pithou (mort en 1619) et des érudits humanistes et avocats Pierre et Nicolas Pithou, François Pithou est de ceux-ci et initie la fondation du Collège de l’Oratoire. A sa mort, en 1621, il lègue à la ville de Troyes toute la bibliothèque familiale des Pithou sur laquelle il a veillé durant des décennies pour fonder un collège : l’objectif avoué est d’éviter absolument la création d’un collège Jésuite en confiant l’enseignement à d’autres religieux.

Cette édition des oeuvres de Pierre Pithou en latin a été imprimée en 1609. Comme l’indique l’ex-libris lui aussi en latin, il est arrivé dans la bibliothèque des Oratoriens de St-Magloire grâce à un don du seigneur de La Poterye. L’ex-libris de La Poterye figure également en bas de la page. [Carteron 56]. Photo Médiathèque de Troyes Champagne Métropole

 

La congrégation de l’Oratoire est appelée par l’évêque pour donner les cours et faire fonctionner le collège qui ouvre sur la place de l’actuel marché couvert. Le succès est rapide et l’enseignement des oratoriens, dont la fondation est alors très récente, est bien adapté aux réalités et aux nécessités de l’époque.

Enseignants plutôt tolérants et laissant une certaine liberté à leurs élèves, les Oratoriens se démarquent en privilégiant l’étude de l’histoire et des sciences à celle de la théologie, plus classique à l’époque. La collection troyenne provenant du Collège de l’Oratoire témoigne de cette ouverture d’esprit : pièces de théâtre jouées avec les élèves, cours sur la cosmographie, les continents et les planètes, exercices de mathématiques… Il y en a pour tous les goûts !

 Page de titre des chroniques de Louis XI, roi de France à la fin du 15e siècle. Imprimé vers 1490 à Lyon, cet incunable, très ancien livre imprimé, porte également l’ex-libris des Oratoriens qui prouve qu’il faisait partie de leur bibliothèque. Rien d’étonnant puisque l’histoire était aussi une spécialité des Oratoriens et occupait une place centrale dans leur enseignement. [Inc 260]. Photo Médiathèque de Troyes Champagne Métropole

 

Le droit est également à l’honneur, héritage de l’ancienne bibliothèque des Pithou, grande famille de juristes.

Cette pédagogie nouvelle attire de nombreux élèves… et alimente la haine des Jésuites, qui deviennent bientôt les plus féroces rivaux de l’Oratoire, en France comme à Troyes.

Autre raison de cette opposition, les Oratoriens sont un ordre français, tandis que les Jésuites sont continuellement accusés de favoriser les intérêts de puissances étrangères, principalement de l’Espagne, et d’obéir au pape plus qu’au roi de France.

Ironie de l’histoire, les Jésuites finissent tout de même par s’immiscer dans les bibliothèques troyennes, par le biais de leurs livres, donnés ou achetés. Même celle du Collège de Oratoire n’échappe pas à la règle. Antonio Iglesias (Jean Muller, La Vie à Troyes sous louis XIII) a ainsi compté environ 300 ouvrages rédigés par 75 auteurs Jésuites dans les bibliothèques troyennes du 17e siècle.

Vie du Père Ignace de Loyola, fondateur des Jésuites. Imprimé en 1607 à Arras, ce livre s’est retrouvé dans une bibliothèque troyenne malgré la méfiance locale à l’encontre des Jésuites. La reliure est d’époque et porte encore les lanières de cuir qui servaient à refermer le livre. [CC.9.3340]. Photo Médiathèque de Troyes Champagne Métropole

Livre en espagnol qui décrit les fêtes ayant célébré la canonisation d’Ignace de Loyola, fondateur des Jésuites. Imprimé à Madrid en 1622, il a lui aussi rejoint un fonds troyen. Ordre d’origine espagnole, les Jésuites étaient régulièrement accusés d’espionnage ou de manoeuvres politiques pour déstabiliser le Royaume de France en faveur de l’Espagne. [II.7.2805]. Photo Médiathèque de Troyes Champagne Métropole

 

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