Interview – L’animal dans l’éducation royale au 17e siècle

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Par Bernard Teyssandier | Le 19 janvier 2019 | Imprimés

A l’issue de sa conférence à la Médiathèque de Troyes Champagne Métropole, Bernard Teyssandier évoque avec nous les principes de l’éducation des rois de France au 17e siècle et la place des animaux dans. les lectures d’un jeune roi.

Les principes de l’éducation royale sont-ils différents au Grand Siècle (17e siècle) des siècles précédents ? Comment vont-ils ensuite évoluer au 18e siècle ?

Le Grand Siècle constitue une période charnière. L’époque prolonge la tradition des « miroirs » princiers  et des Institutiones regis. Elle entérine aussi une pratique éducative qui remonte aux Valois, à Charles V précisément, lequel, par l’ordonnance d’août 1374, fixe la majorité de l’héritier du Royaume de France à quatorze ans accomplis. L’usage veut donc que le dauphin soit confié aux femmes jusqu’à six ans (une gouvernante nommée par le roi dirige cette première formation) et qu’à l’âge de sept ans, l’enfant ait affaire à une équipe exclusivement masculine (c’est le fameux « passage aux hommes »).

Pourtant, un certain nombre de faits importants plaident en faveur d’une évolution par rapport aux grandes époques précédentes: Antiquité, Moyen Âge, Renaissance.  Au 17e siècle, en France, le livre et le savoir livresque ne disposent plus exactement de la même aura qu’auparavant. Sous le règne des Bourbons, l’idée d’une culture pratique prévaut dès lors qu’elle s’adresse au souverain : un bon prince n’est pas nécessairement un érudit, un homme du livre, c’est un prince habile, capable d’exercer à bon escient son autorité. Cette forme de suspicion à l’encontre d’un enseignement théorique (pas nécessairement en référence à Machiavel) affecte d’ailleurs l’image du pédagogue de profession, assimilé très souvent à un pédant. Autre point, et non des moindres : après la mort d’Henri IV, la figure royale se décline volontiers sous la forme de l’« impeccabilité » (Arlette Jouanna) : le roi est parfait, il n’a pas d’égal, sa nature est divine. Dans ces conditions, l’idée même d’éduquer un être parfait relève du paradoxe, voire de l’aporie. Au point qu’au Grand Siècle l’éducation royale se constitue en véritable point aveugle de la représentation : on ne saurait faire du Très Chrétien, véritable miracle vivant, un élève à proprement parler ; aussi l’idée d’un « roi apprentif », d’un roi qui aurait à apprendre de ses maîtres, est-elle une notion quasiment impensable.

Pour étudier l’éducation du prince au 17e siècle, il y a donc bien nécessité à distinguer le roi-enfant et l’enfant roi : un dauphin, en effet, n’est pas exactement un roi, fût-il destiné à devenir roi. A l’époque des Lumières, l’idée qu’un roi n’est plus tout à fait un dieu induit évidemment d’autres conceptions éducatives : Les Aventures de Télémaque (1699), de ce point de vue, vont constituer une œuvre pionnière et novatrice.

Au Moyen Âge, les animaux sont souvent des allégories de personnages humains ou représentent des fonctions sociales : est-ce toujours le cas au 17e siècle ?

L’enquête que j’ai pu mener sur les représentations éducatives au Grand Siècle me conduit à penser que l’animal autorise trois types de figurations. Une figuration que je dirais emblématique : associé à tel ou tel prince, l’animal renvoie à des traits supposés de son caractère. Une figuration allégorique : l’animal sert de relais à un discours d’éloge ou à un discours polémique ; en cela, il participe volontiers de la construction du portrait royal. Une figuration philosophique : l’animal permet de penser l’homme, le prince à travers l’homme, et l’homme à travers le prince.

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